Voir la source de Dynamomètre

Un '''dynamomètre''' est un appareil de mesure d'une [[Force (physique)|force]] ou d'un [[couple (physique)|couple]]. Il utilise un [[Ressort (mécanique élémentaire)|ressort]] (cas d'un modèle simple) dont on connaît la [[Raideur (mécanique)|raideur]] définie par le [[module d'élasticité]], ou une [[Capteur de force|cellule]] à [[jauge de déformation]]. Le [[peson]] est son nom d'origine.

L'unité de force est le [[Newton (unité)|newton]] (symbole N) du nom du fondateur de la théorie de la [[gravitation universelle]], [[Isaac Newton]]. Les multiples les plus utilisés sont le décanewton (daN, unité voisine en valeur du [[kilogramme-force]]) et le kilonewton (kN). La [[dyne]] (symbole dyn) est une ancienne unité de force.

Aujourd'hui la plupart des dynamomètres sont [[numérique]]s et tendent à remplacer les modèles [[mécanique (science)|mécaniques]], que ce soit en recherche-développement ou en [[contrôle qualité]].

== Dynamomètre mécanique ==
Les dynamomètres mécaniques utilisent directement le principe de la [[loi de Hooke]]. En effet, puisqu'un [[Ressort (mécanique élémentaire)|ressort idéal]] suit une relation de type {{nobr|force {{=}} raideur × allongement}}, on peut en déduire la valeur d'une force par mesure de l'allongement d'un ressort étalonné (c'est-à-dire dont on connaît la raideur). Parmi les dynamomètres mécaniques les plus connus, on peut mentionner les [[peson]]s, et le dynamomètre de [[Jean-Victor Poncelet|Poncelet]] (utilisé au {{s|XIX}} pour la police du [[Roulage (mine)|roulage]]). Le fonctionnement de cet appareil, imaginé par le fabricant d'instruments bourguignon [[Edme Régnier]], a été perfectionné par le [[Antoine Raucourt de Charleville|colonel Raucourt]]<ref name="Navier">Cf. {{article|auteur1=H. Navier|auteur2=G. de Prony|auteur3=[[Pierre-Simon Girard|P. S. Girard]]|titre=Rapport sur les mémoires relatifs à la mesure des vitesses de la Néva à Saint-Pétersbourg, par M. le colonel RAUCOURT.|journal=Journal du génie civil, des sciences et des arts |éditeur=Alex. Corréard|lieu=Paris |date=1831|volume=X|url=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6491197m/texteBrut}}. </ref>, puis analysé par les ingénieurs [[Adhémar Barré de Saint-Venant|Saint-Venant]]<ref name="Saint-Venant">Cf. A. Barré de Saint-Venant, ''Mémoire sur la police du roulage'' adressé au Directeur des Ponts et Chaussées (1830).</ref> et [[Jean-Victor Poncelet|Poncelet]] : du point de vue de la théorie de l'élasticité, on peut le voir comme un cas particulier d’anneau dynamométrique, dont la forme elliptique augmente sa sensibilité dans l'extension selon son grand axe<ref>Cf. {{article|auteur=Henri Léauté|titre=Note sur le profil des lames du dynamomètre de Poncelet |série=3e |volume= 9 |journal=Journal de mathématiques pures et appliquées |date=1883|numéro=8|url=http://portail.mathdoc.fr/JMPA/afficher_notice.php?id=JMPA_1883_3_9_A8_0|passage=245-256}}.</ref>.
<gallery>
Dinamometro.svg|Schéma de principe d'un dynamomètre à ressort
Dynamometer-CnAM 4166-IMG 6877-white.jpg|Dynamomètre Régnier (Conservatoire National des Arts et Métiers, Paris).
</gallery>

== Dynamomètre numérique ==
Un dynamomètre numérique est un instrument (portable ou fixe) composé d'un [[capteur de force]], d'un dispositif [[électronique]] et d'un afficheur.

Le [[capteur]] de force est le cœur du système. Il peut être assimilé à un ressort qui se déforme en fonction de la force appliquée. Lorsque ce capteur se déforme, les jauges de déformation mesurent les [[tenseur des contraintes|contraintes]] appliquées et émettent une [[tension électrique]] proportionnelle à la force. L'électronique du dynamomètre interprète alors cette tension pour l'afficher en unités de force.

=== Extensométrie ===
{{Article détaillé|Extensométrie}}
[[Fichier:DoubleBBeam WZ.png|vignette|Les cellules de force sont des transducteurs à jauge ; celle-ci mesure l'effort de flexion par différence de déformation dans chaque branche d'acier (jauges 30K / 5g).]]
[[Fichier:Silomer 100kN.jpg|vignette|Les '''cellules Glötzl''' mettent en œuvre un liquide incompressible (huile minérale) pour convertir un effort de compression en [[Théorie des plaques|flexion d'une membrane]], instrumentée par des jauges. Elles sont fréquemment utilisées en génie civil pour contrôler l'effort de tension dans les [[Mur de soutènement#La paroi ancrée|tirants d'ancrage]].]]
Les [[jauge de déformation|jauges de déformation]] sont des résistances dont l'augmentation de résistance électrique varie avec l'allongement dans une direction donnée. On les fixe directement sur le ressort et l'on mesure leur résistance grâce à un [[pont de Wheatstone]]. Les mesures sont aujourd'hui possibles jusqu'à une [[fréquence]] de {{unité/2|8|MHz}}, mais il faut une compensation en température, et le comportement à long terme laisse à désirer par suite du [[fluage]]. On distingue généralement :
* les jauges à conducteur : l'allongement et la striction augmentent la résistance électrique ;
* les jauges à semi-conducteur : la résistance électrique spécifique augmente avec l'allongement par développement d'efforts internes ([[Piézorésistance|effet piézoresistif]]). De telles jauges sont plus sensibles que les jauges traditionnelles.
<!--On peut voir dans le ''[[tasimètre]]'' d'Edison, qui mesurait l'altération de la résistivité d'un charbon par pression ambiante, un ancêtre de cette technique.-->

=== Mesure par effet magnétostatique ===
L'état de [[Contrainte (mécanique)|contrainte]] dans un métal modifie de façon déterminée sa [[perméabilité magnétique]] µ ([[magnétostriction]] inverse). En pratique, on détecte cette variation par celle du champ magnétique créé entre les [[Bobine (électricité)|bobines primaire]] et secondaire d'un transformateur.
:<math>F = f(\mu)</math>
Ce capteur supporte des charges importantes.
Cette technique, brevetée en 1954, est utilisée dans des capteurs commercialisés par [[Groupe ABB|ABB]] sous le nom de ''Pressductor''<ref>[http://www.abb.com/product/ap/seitp330/7c2dbedf705e56d1c1257899003180d0.aspx ''Pressductor''], sur ''abb.com''</ref>.

=== Mesure par effet piézoélectrique ===
{{Article détaillé|Piézoélectricité}}
Dans un insert [[Céramique technique|piézo-céramique]], l'application d'une force ''F'' engendre une charge électrique ''Q'' proportionnelle à la force.
:<math>F \propto Q</math>
On peut fabriquer des capteurs piézoélectriques très durs, et mesurer grâce à eux des variations à très [[haute fréquence]] (au-delà de {{unité/2|100|kHz}}). Dans les essais statiques ou quasi statiques, il faut veiller à la stabilité du point d'application des forces. On peut enregistrer les tensions planes en utilisant un tri-couches de céramiques avec une orientation précise de chaque couche.

=== Mesure par compensation électromagnétique ===
Le principe est ici celui du [[haut-parleur]] : une bobine mobile est immergée dans un champ magnétique. Un [[Asservissement (automatique)|asservissement]] avec un [[capteur de déplacement]] maintient la bobine en position, et le [[courant induit]] dans la bobine est proportionnel à la force s'exerçant sur elle. Par l'expression générale de la [[force de Lorentz]], on a ainsi :
:<math> \text{si} \ B \perp l \text{, alors } F = B \cdot i \cdot l</math>
:avec : ''B'' intensité du champ magnétique, ''i'' courant électrique induit, ''l'' longueur effective du conducteur.
Ces capteurs ne permettent cependant de mesurer que de petites forces (maximum 20-{{unité|30|N}}) et sont pour cette raison plutôt utilisés dans les balances de précision.

=== Mesure par corde vibrante ===
{{Article détaillé|Corde vibrante}}
La période de vibration d'une corde tendue dépend de sa tension ''T'' selon la formule de [[Jean le Rond D'Alembert|D'Alembert]] :
:<math>T = 4 \cdot m_\mathrm b \cdot l^2 \cdot f^2</math>
:avec : ''m''<sub>b</sub> [[masse linéique]] de la corde en kg/m, ''l'' longueur libre de vibration, ''f'' [[fréquence propre]].

On peut mesurer la tension d'une [[courroie]] en déterminant sa fréquence de vibration avec un [[fréquencemètre]] optique<ref>[http://www.contitech.de/pages/produkte/antriebsriemen/antrieb-industrie/serviceprogramm_de.html Mesure de la tension d'une courroie]</ref>.

=== Mesures de nanoforces ===
[[Microscope à force atomique]] et [[guide d'onde]]
Cette méthode permet de mesurer les forces en biologie. On insère un guide d'onde à résonance dans un multicouche élastique. Si, par la force d'adhérence d'une cellule, la fibre supérieure du capteur est déformée localement, on peut estimer la force correspondante en mesurant le déplacement du pic de résonance. La résolution est de {{unité|20|nN}}<ref>K.-F. Giebel, Thèse de doctorat : ''{{Lang|de|texte=Wellenleitermikroskopie: eine neue Methode zur Kraftmessung in biologischen Systemen}}'', Bibliothèque universitaire de Constance, 17 juillet 2003</ref>.

== Applications ==
Les dynamomètres sont de nos jours utilisés dans de nombreux domaines.

=== Machines d'essais universelles ===
Ces [[Machine de traction|machines d'essais en traction ou en compression]] (presse) sont équipées d'une [[Capteur de force|cellule dynamométrique à jauge de déformation]]. Très répandues, elles sont conçues pour fournir au laboratoire industriel ou scientifique l'analyse des propriétés mécaniques « quasi instantanées »<ref>Les essais de [[Choc mécanique|chocs]] font appel à d'autres techniques.</ref> des matériaux en fonction de multiples paramètres de l'essai ([[Déformation d'un matériau|déformation]], [[vitesse de déformation]], température, histoire thermique{{etc.}}).

Les capteurs de force sont munis d'un câble électrique terminé par un connecteur et sont rapidement interchangeables (sauf pour les gros modèles). La fréquence de leur étalonnage est souvent annuelle.

Les premières machines étaient reliées à un enregistreur graphique. Les plus récentes sont connectées ''via'' un boîtier-interface à un [[ordinateur personnel|PC]] muni d'un logiciel. Ce système permet le pilotage, l'acquisition, la visualisation, l'analyse numérique et graphique, l'exportation de fichiers [[American Standard Code for Information Interchange|ASCII]] vers un [[tableur]], la sauvegarde et l'impression des données du test.

La [[Traverse (architecture)|traverse]] supérieure est fixe. La traverse mobile est entraînée par deux vis latérales, actionnées par un [[machine électrique|moto]]-[[réducteur mécanique|réducteur]] à [[courant continu]]. La liaison entre les vis et le réducteur s'effectue par [[poulie]]s et [[courroie synchrone]] en élastomère armé.

La vitesse de déformation (ou de sollicitation) ''v'' est faible (''v'' peut varier de 0,1 à {{unité|500|mm/min}} ; en pratique ''v'' est souvent comprise entre 1 et {{unité|50|mm/min}}).

Des modèles renforcés (avec notamment bâti mécanique, moteur, transmission et capteur de force adaptés) peuvent réaliser des tests mécaniques mettant en jeu des forces élevées<ref>C'est le cas par exemple d'éprouvettes en forme d'haltère en métal soumises à une sollicitation en [[essai de traction|traction]] ou d'éprouvettes de géométrie normalisée en [[béton]] soumises à une sollicitation en [[Essai de compression|compression]].</ref>. Leur capteur de force peut mesurer plusieurs centaines de kN (en [[Tension mécanique|traction]], [[Compression (physique)|compression]], [[flexion (matériau)|flexion]]{{etc.}}).

Remarque : un bouton d'[[Arrêt d'urgence (Automatisme)|arrêt d'urgence]] doit être présent.

L'application la plus courante est la mesure de la force à la [[rupture (matériau)|rupture]] (force ''maximale'', ''F''<sub>m</sub>, obtenue avant d'atteindre la rupture) en traction afin de savoir si un produit et/ou un montage est conforme ou non. Les ''résistances à la rupture'' en traction (''R''<sub>m</sub> ou σ<sub>m</sub>) ou au [[Contrainte de cisaillement|cisaillement]] (τ<sub>m</sub>) ont la [[Analyse dimensionnelle|dimension]] d'une contrainte et sont déduites de la force à la rupture ; ces deux résistances sont souvent exprimées en M[[pascal (unité)|Pa]]<ref>Les essais de [[Pelage (test d'adhésion)|pelage]] et de [[clivage]] sont assez peu pratiqués. Les résistances au pelage et au clivage s'expriment en N/m (force à la rupture/largeur de l'éprouvette).</ref>.

Par exemple, on peut déterminer la force nécessaire pour séparer un connecteur d'un câble, la force de fermeture d'une porte, une force d'[[emboîtage élastique]] ou évaluer la qualité d'un ressort d'amortisseur.

Remarque : une machine de traction peut être couplée à un [[Extensométrie|extensomètre]] (de type optique, par exemple) permettant l'enregistrement des courbes contrainte σ = f(déformation ε) des [[Éprouvette (matériau)|éprouvettes]] soumises à une sollicitation en traction. Ainsi, il est possible de caractériser la souplesse du matériau utilisé par la valeur de l'''[[allongement à la rupture]]'' ''A''%<ref>De plus, la mesure de la contraction latérale que subit un échantillon lors d'une expérience d'élongation permet d'accéder au [[coefficient de Poisson]] d'un corps [[loi de Hooke|hookéen]].</ref>.

<gallery>
Dynamometer.jpg|Évaluation de la [[résistance des matériaux|résistance]] à la rupture en TC d'un joint de colle<ref>« TC » : (traction-)[[Contrainte de cisaillement|cisaillement]]. Vitesse de traction ''v''={{unité|10|mm/min}}. Le capteur de force (interchangeable ; de capacité {{unité|10|kN}}) est fixé sur la [[Traverse (architecture)|traverse]] mobile de la machine d'essais. Une [[chambre d'essais]] est visible en arrière-plan.</ref>.
Self-tight jaws.jpg|Attaches auto-serrantes<ref>L'utilisation d'attaches auto-serrantes à coins est recommandée pour certains essais nécessitant des forces élevées ; cela évite le risque de glissement des extrémités de l'éprouvette.</ref>.
Tension-shear test load-crosshead displacement curves.png|Exploitation de l'essai de TC pris pour exemple<ref>Le logiciel trace en [[Système temps réel|temps réel]] une courbe ''F''=f(déplacement de la traverse) de ce type (détermination sur trois assemblages). Pour un essai de traction ou de cisaillement, la valeur de la résistance mécanique = ''F''<sub>m</sub> / ''S'' ; avec ''S'' = section ou surface, suivant le type d'essai. Le résultat de l'essai de résistance au cisaillement est fortement dépendant de l'épaisseur du joint.</ref>.
Compression test.jpg|[[Essai de compression]]<ref>Compression d'un cylindre en [[Matériau composite|composite]] au moyen d'une machine équipée d'un dynamomètre de {{unité|300|kN}}.</ref>.
</gallery>

== Notes et références ==
{{Références}}

== Voir aussi ==
{{autres projets|commons=Category:Dynamometers|commons titre=Dynamomètres}}

=== Articles connexes ===
* [[Peson]]
* [[Jauge de déformation]]
* [[Balance (instrument)|Balance]]
* [[Clé dynamométrique]]
* [[Frein de Prony|Frein dynamométrique]]
* [[Essai mécanique]]
* [[Machine de traction]]
* [[Ténacité]], une propriété qui dépend de la contrainte (ou résistance) à la rupture
* [[Analyse mécanique dynamique|Analyseur DMA]], un instrument équipé d'un [[capteur de force]] dynamique
* [[Électrodynamomètre]] pour mesurer l'intensité d'un [[courant électrique]].

{{Palette|Instruments de mesure|Capteur}}

{{Portail|physique|matériaux}}

[[Catégorie:Instrument de mesure]]
[[Catégorie:Capteur]]
[[Catégorie:Instrument de mesure mécanique]]
[[Catégorie:Instrument scientifique]]
[[Catégorie:Mesure physique]]
[[Catégorie:Science des matériaux]]
[[Catégorie:Mécanique]]
[[Catégorie:Essai mécanique]]