Voir la source de Fonction digamma

[[File:Mplwp digamma.svg|thumb|Représentation de la fonction digamma {{math|''ψ''}} restreinte aux réels.]]
[[File:Psi0.png|thumb|upright=1.5|Représentation colorée de la fonction digamma, {{math|''ψ''(''z'')}}, dans une région rectangulaire du plan complexe.]]

En [[mathématiques]], la '''fonction digamma''' ou '''fonction psi''' est définie comme la [[dérivée logarithmique]] de la [[fonction gamma]] :

<center><math>\psi(z)=\frac{\Gamma'(z)}{\Gamma(z)}.</math></center>

== Historique et notations ==
{{...}}
À la suite des travaux d'[[Euler]] sur la [[fonction gamma]], [[James Stirling (mathématicien)|James Stirling]] a introduit la fonction digamma en 1730, en la notant par Ϝ, la [[digamma|lettre grecque digamma]] (majuscule){{référence souhaitée}}. Elle fut par la suite étudiée par [[Adrien-Marie Legendre|Legendre]], [[Siméon Denis Poisson|Poisson]] et [[Carl Friedrich Gauss|Gauss]] vers 1810 ; la convergence de la série de Stirling pour cette fonction a été démontrée par [[Moritz Stern|Stern]] en 1847<ref>{{en}} [http://functions.wolfram.com/GammaBetaErf/PolyGamma/introductions/DifferentiatedGammas/01/ Historique de la fonction digamma] sur le site de [[Wolfram Research]].</ref>. Elle est désormais le plus souvent notée par la lettre {{math|''ψ''}} ([[Psi (lettre grecque)|psi minuscule]]).

== Motivation ==
Considérant la [[fonction gamma]] comme une généralisation formelle de la factorielle (plus précisément, <math>
\Gamma(x)=1\times 2\times\dots\times (x-1)</math>), on en déduit tout aussi formellement, en utilisant les propriétés de la [[dérivée logarithmique]], qu'on devrait avoir
:<math>\psi(z)=\frac{\Gamma'(z)}{\Gamma(z)}=1+ 1/2 + 1/3+\dots+ 1/(z-1)= H_{z-1}</math>,
où {{mvar|H{{ind|n}}}} est le {{mvar|n}}-ième [[nombre harmonique]].

La fonction digamma pourrait ainsi définir une généralisation des nombres harmoniques aux complexes. Une formule exacte pour {{math|''ψ''(''n'')}}, confirmant presque le calcul précédent, sera obtenue plus bas rigoureusement pour ''n'' entier.

==Propriétés==
La fonction digamma est une [[fonction méromorphe]] définie sur tout le [[plan complexe]] privé des [[Entier relatif|entiers]] [[Nombre négatif|négatifs]].

La définition de la fonction gamma sous forme intégrale (<math>\Gamma (z) = \int_0^{+\infty}  t^{z-1}\,\mathrm e^{-t}\,\mathrm dt</math>) montre que pour tout [[nombre complexe]] {{math|''z''}} de [[partie réelle]] strictement positive,
{{Retrait|<math>\psi(z)=\frac{\int_0^\infty y^{z-1} \ln y\ {\rm e}^{-y}~{\rm d}y}{\int_0^\infty y^{z-1}{\rm e}^{-y}~{\rm d}y}</math>.}}

Ainsi,
:<math>\psi(1)=\int_0^\infty \ln y\ {\rm e}^{-y}~{\rm d}y=-\gamma</math>, où {{math|1=γ = 0,577…}} est la [[constante d'Euler-Mascheroni]].

Par ailleurs, <math>\Gamma(z+1)=z\Gamma(z)</math> donc on a (en dérivant) la relation de « récurrence »
:<math>\psi(z+1) = \psi(z) + \frac1z</math> ;
en fait, le [[théorème de Bohr-Mollerup]] montre que la fonction digamma est la seule solution de l'équation fonctionnelle
:<math>F(x + 1) = F(x)+\frac1x</math>
qui est monotone sur {{math|'''R'''{{ind|+}}}} et qui vérifie {{math|1=''F''(1) = −''γ''}}.

On en déduit que la fonction digamma d'un entier ''n'' > 0, souvent notée aussi {{math|''ψ''{{ind|0}}(''n'')}} ou même {{math|''ψ''{{exp|(0)}}(''n'')}}<ref>C'est un cas particulier de la notation {{math|''ψ{{ind|k}}''(''n'')}} des [[fonction polygamma|fonctions polygamma]].</ref>, est reliée aux [[nombre harmonique|nombres harmoniques]] par
:<math>\frac{\int_0^\infty y^{n-1} \ln y\ {\rm e}^{-y}~{\rm d}y}{(n-1)!}=\psi(n) = H_{n-1}-\gamma</math>
où <math>H_{n-1}=1+\frac12+\frac13+\cdots+\frac1{n-1}</math> est le (''n ''– 1)-ième nombre harmonique.

La fonction digamma satisfait également une {{Lien|trad=Reflection formula|formule de réflexion}} similaire à [[Fonction gamma#Formule des compléments|celle de la fonction Gamma]] : pour tout nombre complexe {{math|''z''}} dont la partie réelle est strictement comprise entre 0 et 1,

:<math>\psi(1 -z) - \psi(z) = \pi\,\!\cot{ \left ( \pi z\right ) }</math>.
D'autres représentations par des intégrales existent. Ainsi, si la partie réelle de {{mvar|z}} est positive, on a :
:<math>\psi(z) = \int_0^{\infty}\left(\frac{{\rm e}^{-t}}t-\frac{{\rm e}^{-zt}}{1-{\rm e}^{-t}}\right)\,{\rm d}t</math>,
qu'on peut aussi écrire 
:<math>\psi(s+1)= -\gamma + \int_0^1 \frac {1-x^s}{1-x}~{\rm d}x</math>.

== Représentation par des séries ==
La relation de récurrence permet d'obtenir la formule suivante<ref>{{Handbook of Mathematical Functions (Abramowitz et Stegun)}}, chap. 6.3 (« psi (Digamma) Function. »), [http://www.math.sfu.ca/~cbm/aands/page_259.htm p. 258–259] : formule 6.3.16.</ref> :
:<math>\psi(z)=-\gamma+\sum_{j=0}^{+\infty}\left( \frac1{j+1}-\frac1{j+z}\right)=-\gamma-\frac1z+z\sum_{k=1}^{+\infty}\frac1{k(k+z)}.</math>

La fonction digamma possède également une représentation en [[série zêta rationnelle]] :
:<math>\psi(z+1)= -\gamma -\sum_{k=1}^\infty \zeta (k+1)\;(-z)^k</math> (où {{math|''ζ''(''n'')}} est la [[fonction zêta de Riemann]]),
qui converge pour {{math|{{!}}''z''{{!}} < 1}}. Cette série se déduit aisément de la série de Taylor (en 1) de la [[fonction zêta de Hurwitz]].

On déduit de la formule intégrale d'Euler le développement suivant en [[Différence finie#Série de Newton|série de Newton]] (convergeant pour {{math|Re(''s'') > –1}}) :
:<math>\psi(s+1)=-\gamma-\sum_{k=1}^\infty \frac{(-1)^k}k{s \choose k}</math>
où <math>\textstyle{s \choose k}</math> est un [[coefficient binomial]] (généralisé) : <math>{s \choose k} = \frac{s(s-1)(s-2)\cdots (s-k+1)}{k!}</math>.

== Utilisation pour le calcul de sommes de séries ==
La formule précédente, équivalente à 
:<math>\psi(z+1)= -\gamma +\sum_{n=1}^\infty\frac z{n(n+z)} \qquad z \neq -1, -2, -3, \ldots</math>
permet d'évaluer des séries de [[fraction rationnelle|fractions rationnelles]] de la forme
:<math>\sum_{n=0}^{\infty}u_n=\sum_{n=0}^{\infty}\frac{p(n)}{q(n)}</math>,
où ''p''(''n'') et ''q''(''n'') sont des polynômes en ''n'' : décomposant {{math|''u<sub>n</sub>''}} en [[décomposition en éléments simples|éléments simples]] (lorsque les racines de ''q'' sont toutes simples), on obtient
: <math>u_n=\frac{p(n)}{q(n)}=\sum_{k=1}^m\frac{a_k}{n+b_k}</math> ; la série converge si <math>\lim_{n\to\infty}nu_n=0</math>, et donc si <math>\sum_{k=1}^ma_k=0</math>.

Dans ce cas, 
:<math>\begin{align}
\sum_{n=0}^{\infty}u_n&= \sum_{n=0}^{\infty}\sum_{k=1}^m\frac{a_k}{n+b_k} \\
&=\sum_{n=0}^{\infty}\sum_{k=1}^ma_k\left(\frac1{n+b_k}-\frac1{n+1}\right) \\
&=\sum_{k=1}^ma_k\sum_{n=0}^{\infty}\left(\frac1{n+b_k}-\frac1{n+1}\right)\\
&=-\sum_{k=1}^ma_k\left(\psi(b_k)+\gamma\right) \\
&=-\sum_{k=1}^ma_k\psi(b_k).
\end{align}</math>

En particulier, on obtient 
:<math>\sum_{n=0}^{\infty}\frac1{(n+a)(n+b)}=\frac{\psi(b)-\psi(a)}{b-a}</math>,
expression qui, d'après un théorème de Gauss {{infra|Un théorème de Gauss}}, peut être explicitée si {{mvar|a}} et {{mvar|b}} sont rationnels ; par exemple, 
:<math>\sum_{n=0}^{\infty}\frac1{(4n+1)(3n+1)}=\psi(1/3)-\psi(1/4)=3\ln(2/\sqrt3)+\pi/2-\pi\sqrt3/6</math><ref>{{en}} [http://mathoverflow.net/questions/224924/exact-formula-for-sum-n-0-infty-frac1n21 Une étude de ces sommes], sur [[MathOverflow]].</ref>.
Enfin, dans le cas où ''q'' admet des racines multiples, un passage à la limite fait apparaître les dérivées de la fonction digamma ; ainsi,
:<math>\sum_{n=0}^{\infty}\frac1{(n+a)^2}=\psi'(a)=\psi_1(a)</math>,
où {{math|''ψ''{{ind|1}}}} est la [[fonction polygamma]] d'ordre 1.

== Valeurs spéciales ==
La fonction digamma a des valeurs exprimables à l'aide des fonctions usuelles et de la [[constante d'Euler-Mascheroni]] pour des arguments rationnels, par exemple :

: <math> \psi(1) = -\gamma</math>

: <math> \psi(2)=H_1-\gamma=1-\gamma</math>

: <math> \psi(3)=H_2-\gamma=\frac32-\gamma</math>

: <math> \psi(4)=H_3-\gamma=\frac{11}6-\gamma</math>

: <math> \psi\left(\tfrac12\right) = -2\ln2- \gamma\,= \frac1{\sqrt {\pi}}\int_0^\infty y^{-1/2} \ln y\ {\rm e}^{-y}~{\rm d}y</math>

: <math> \psi\left(\tfrac13\right) = -\frac{\pi}{2\sqrt3}-\frac32\ln3- \gamma</math><ref>{{Article|lang=en
|auteur=Horst Alzer|auteur2=Dimitri Karayannakis|auteur3=H. M. Srivastava
|titre= Series representations for some mathematical constants
|page=145-162
|année= 2006
|revue={{Lien|Journal of Mathematical Analysis and Applications}}|vol=320|issue=1
|doi=10.1016/j.jmaa.2005.06.059
}} ({{p.|151}}).</ref>,

:<math>\psi\left(\tfrac14\right)=-\frac\pi2-3\ln2-\gamma</math><ref>{{Harvsp|Alzer|Karayannakis|Srivastava|2006|p=149}}.</ref>, etc.

De plus, la représentation par une série permet aisément de montrer qu'à l'[[unité imaginaire]], on a
:<math>\begin{align}
{\rm Re}\left(\psi({\rm i})\right) &= -\gamma-\sum_{n=0}^\infty\frac{n-1}{n^3+n^2+n+1}, \\ 
{\rm Im}\left(\psi({\rm i})\right) &= \sum_{n=0}^\infty\frac1{n^2+1} = \frac12+\frac{\pi}2\coth\pi,
\end{align}</math>
où {{math|coth}} est la fonction [[cotangente hyperbolique]].

== Un théorème de Gauss==
Plus généralement, pour des entiers {{mvar|p}} et {{mvar|q}} tels que {{math|0 < ''p'' < ''q''}}, la fonction digamma s'exprime à l'aide de la constante d'Euler et d'un nombre fini de fonctions élémentaires<ref>{{MathWorld|nom_url=GausssDigammaTheorem|titre=Gauss's Digamma Theorem}}.</ref> :
:<math>\psi\left(\frac pq\right)=-\gamma-\ln(2q)-\frac{\pi}2\cot\frac{p\pi}q+2\sum_{n=1}^{\lfloor\frac{q-1}2\rfloor}\cos\frac{2\pi np}q\ln\left(\sin\frac{\pi n}q\right)</math> ;
la relation de récurrence permet d'en déduire sa valeur pour tous les arguments rationnels<ref>R. Campbell, ''Les intégrales eulériennes et leurs applications'', [[Dunod]], Paris, 1966.</ref>.

== Notes et références==
{{références}}

{{Portail|analyse}}

{{DEFAULTSORT:Digamma}}
[[Catégorie:Fonction gamma ou associée]]
[[Catégorie:Fonction spéciale]]
[[Catégorie:Carl Friedrich Gauss]]