Voir la source de Lemme d'Euclide

En [[mathématiques]], le '''lemme d'Euclide''' est un résultat d'[[arithmétique élémentaire]] sur la [[divisibilité]] qui correspond à la Proposition 32 du [[Livre VII des Éléments d'Euclide|Livre VII]] des [[Éléments d'Euclide|''Éléments ''d'Euclide]]<ref>{{Lien web|auteur=[[Denis Henrion]]|url=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k68013g/f286.image|titre=Traduction|year=1632|site=[[Gallica]]}}. (Numérotée [http://aleph0.clarku.edu/~djoyce/java/elements/bookVII/propVII30.html proposition 30] dans des éditions plus récentes.)</ref>. Il s'énonce ainsi :
{{théorème|[[Lemme (mathématiques)|Lemme]] d'[[Euclide]]|Si un [[nombre premier]] ''p ''[[diviseur|divise]] le produit de deux nombres [[entier relatif|entiers]] ''b ''et ''c'', alors ''p ''divise ''b ''ou ''c''.}}

Une généralisation est :
{{théorème|Lemme de [[Carl Friedrich Gauss|Gauss]]|Si un nombre [[entier relatif|entier]] ''a ''divise le produit de deux autres nombres entiers ''b'' et ''c'', et si ''a'' est [[nombres premiers entre eux|premier avec]] ''b'', alors ''a'' divise ''c''.}}

Formellement :
<center><math>\forall(a,b,c)\in\Z^3,(a|bc\land\operatorname{PGCD}(a,b)=1)\Rightarrow a|c.</math></center>

Dans le traité de Gauss, les ''[[Disquisitiones arithmeticae]]'', l'énoncé du lemme d'Euclide constitue la proposition 14 (section 2), qu'il utilise pour prouver l'unicité de la [[décomposition en produit de facteurs premiers]] d'un entier (théorème 16), admettant l'existence comme {{citation|évidente}}. De [[Théorème fondamental de l'arithmétique|cette existence et unicité]], il déduit alors « son » lemme (article 19).

Les noms de ces deux propositions sont parfois confondus{{refnec}}. On notera par ailleurs que le lemme « de Gauss » apparaît déjà dans les ''Nouveaux éléments de mathématiques'' de [[Jean Prestet]] au {{s-|XVII}}<ref> {{Euclide Vitrac}}, vol. 2, p. 338-339.</ref>.

Le lemme de Gauss se généralise à tout [[Anneau commutatif|anneau (commutatif, unitaire)]] [[Anneau intègre|intègre]] [[anneau à PGCD|à PGCD]], en particulier à tout [[anneau principal]] comme [[Arithmétique des polynômes|celui des polynômes sur un corps]].

== Démonstration directe du lemme d'Euclide ==
Cette démonstration est essentiellement celle de Gauss, qui [[Raisonnement par l'absurde|raisonne par l'absurde]], en supposant l'existence d'un nombre premier ''p ''et d'entiers naturels ''a ''et ''b ''non divisibles par ''p ''tels que ''p ''divise ''ab''. Pour ''p ''et ''a ''fixés, il choisit le plus petit d'entre ces entiers ''b ''(donc 1 < ''b ''< ''p'', par [[Congruence sur les entiers|réduction modulo ''p'']]) et note ''b' ''le reste de la [[division euclidienne]] de ''p ''par ''b''. Ainsi, ''p = mb + b' ''donc ''ab' = ap – mab ''<u>est multiple de ''p''</u>, or {{nobr|0 < ''b' < b < p''}} donc ''ab' ''<u>n'est pas multiple de ''p''</u> à cause de la minimalité de ''b'', ce qui aboutit à une contradiction et permet de conclure que l'hypothèse ''a ''et ''b ''non divisibles par ''p'' est fausse.

== Démonstration directe du lemme de Gauss ==
Soient ''a'', ''b'' et ''c ''trois entiers, avec [[PGCD]](''a'', ''b'') = 1 et ''a''|''bc''.
Puisque ''a ''divise à la fois ''ac ''et ''bc'', [[Plus grand commun diviseur de nombres entiers#Tout diviseur commun divise le PGCD|il divise leur PGCD]], or [[Plus grand commun diviseur de nombres entiers#Propriétés|PGCD(''ac'', ''bc'') = PGCD(''a'', ''b'')×''c'']] = 1×''c'' = ''c''.

La démonstration pour n'importe quel anneau intègre à PGCD est identique. La démonstration classique pour l'anneau des entiers utilise le [[Théorème de Bachet-Bézout#Théorème de Bachet de Méziriac|théorème de Bézout]]<ref>{{Note autre projet|wikiversité|Arithmétique/Théorèmes de Bézout et Gauss#Énoncé|« Théorème de Gauss » dans la leçon « Arithmétique »|début=Voir par exemple (dans l'anneau des entiers)}} Ou (dans un [[Entier quadratique#Fermeture intégrale et clôture intégrale|anneau d'entiers quadratiques]]) {{Ouvrage|langue=en|auteur=Harvey Cohn|titre=Advanced Number Theory|année=1980|année première édition=1962|éditeur=[[Dover Publications|Dover]]|isbn=978-0-486-64023-5|url={{Google Livres|yMGeElJ8M0wC|page=105}}|page=105}}.</ref> et s'étend donc seulement aux [[Anneau de Bézout|anneaux de Bézout]].

== Conséquences du lemme de Gauss ==
=== Lemme d'Euclide ===
Les nombres premiers et leurs opposés constituent les [[Primalité dans un anneau|éléments irréductibles]] de l'anneau ℤ des entiers. L'énoncé du lemme d'Euclide dans un anneau quelconque est donc : tout irréductible est [[Primalité dans un anneau|premier]] (c'est-à-dire divise l'un des deux facteurs dès qu'il divise un produit). Il est vérifié dès que le lemme de Gauss l'est<ref name=v:Anneau/>.

=== Primalité avec un produit ===
Dans tout anneau (commutatif, unitaire et intègre) vérifiant le lemme de Gauss :
{{énoncé|Un élément est premier avec un produit si (et seulement si) il est premier avec chaque facteur<ref name=v:Anneau/>.}}

=== Lien entre PGCD et PPCM ===
Dans tout anneau ''A'' vérifiant le lemme de Gauss, le [[plus petit commun multiple]] de deux éléments premiers entre eux est leur produit. Plus généralement :
{{énoncé|Pour toute [[n-uplet|famille finie]] d'éléments de ''A'' premiers entre eux deux à deux, leur PPCM est leur produit<ref name=v:Anneau>{{Note autre projet|wikiversité|Anneau (mathématiques)/Anneau principal#Arithmétique dans un anneau principal|dans la leçon « Anneau »|début=Voir la preuve de l'énoncé correspondant}}.</ref>.}}

Réciproquement, si ''A'' vérifie cet énoncé alors il vérifie le lemme de Gauss :
{{Démonstration|1=Soient ''a'', ''b'' et ''c'' non nuls tels que PPCM(''a'', ''b'') = ''ab'' et ''a'' divise ''bc''. Alors, ''ab'' divise ''bc'' donc ''a'' divise ''c''.
}}

=== Unicité de la forme irréductible d'une fraction ===
Tout [[nombre rationnel]] peut s'écrire sous forme d'une [[fraction irréductible]]. Le lemme de Gauss permet de montrer qu'une telle écriture est unique :
{{énoncé|Pour tout rationnel ''r'', l'écriture de ''r ''sous la forme ''r ''{{=}} ''p''/''q'', avec ''p'' et ''q'' premiers entre eux et ''q ''strictement positif, est unique.}}

{{Démonstration/début}}
Soient ''r ''un rationnel et ''p''{{ind|1}}, ''p''{{ind|2}}, ''q''{{ind|1}}, ''q''{{ind|2}} entiers, avec ''q''{{ind|1}}, ''q''{{ind|2}} > 0, tels que ''r ''= ''p''{{ind|1}}/''q''{{ind|1}} = ''p''{{ind|2}}/''q''{{ind|2}} et PGCD(''p''{{ind|1}}, ''q''{{ind|1}}) = PGCD(''p''{{ind|2}}, ''q''{{ind|2}}) = 1.

On a donc ''q''{{ind|2}} | ''p''{{ind|1}}''q''{{ind|2}} = ''p''{{ind|2}}''q''{{ind|1}}. Or ''q''{{ind|2}} est premier avec ''p''{{ind|2}}. Le lemme de Gauss montre que ''q''{{ind|2}}|''q''{{ind|1}}.

De même (en intervertissant les indices) ''q''{{ind|1}}|''q''{{ind|2}}.

D'où ''q''{{ind|1}} = ''q''{{ind|2}}, car ''q''{{ind|1}} et ''q''{{ind|2}} sont positifs.

Puis ''p''{{ind|1}} = ''rq''{{ind|1}} = ''rq''{{ind|2}} = ''p''{{ind|2}}.

La forme irréductible d'un rationnel est donc unique.
{{Démonstration/fin}}

De même, pour tout élément du [[corps des fractions]] d'un anneau intègre à PGCD, l'existence d'une forme irréductible [[Anneau à PGCD#Propriétés des anneaux intègres à PGCD|est assurée]] et son unicité (à produit près par un inversible) se déduit du lemme de Gauss.

=== Fermeture intégrale ===
{{Voir|Anneau intégralement clos}}
De la conséquence [[#Primalité avec un produit|ci-dessus]] sur la primalité avec un produit (et de l'existence d'une forme irréductible pour un anneau à PGCD) on déduit :
{{énoncé|Tout anneau intègre à PGCD est intégralement clos.}}

== Réciproque du lemme de Gauss ==
Soient ''a ''non nul et ''b'', deux éléments d'un anneau intègre. Si, pour tout élément ''c'', ''a ''divise ''bc ''implique que ''a ''divise ''c'', alors ''a ''et ''b ''sont premiers entre eux.

En effet, soit ''d ''un diviseur commun à ''a ''et ''b '': on peut écrire ''a = cd ''et ''b = ed''. Par hypothèse, comme ''a ''divise ''bc'', on a que ''a ''divise ''c ''donc ''d ''est inversible.

== Notes et références ==
<references/>

{{Portail|arithmétique}}

[[Catégorie:Divisibilité et factorisation]]
[[Catégorie:Lemme de mathématiques|Euclide]]