Voir la source de Moment d'inertie

{{voir homonymes|Moment}}
{{Infobox Grandeur physique
| nom            = Moment d'inertie
| image          = Cup_of_Russia_2010_-_Yuko_Kawaguti_(2).jpg
| légende        = En serrant ses bras le long du corps, cette patineuse diminue son moment d'inertie, augmentant sa vitesse de rotation, puisque son [[Moment cinétique (mécanique classique)|moment cinétique]] est conservé.
| unités         = kg.m<sup>2</sup>
| autres unités  = 
| symbole        = ''I'', ''J<sub>Δ</sub>''
| unités de base = 
| dimension      = M.L<sup>2</sup>
| extensive      = oui
| intensive      = 
| conservative   = 
| nature         = tenseur
| expressions    = <math>I=\sum_i m_{i}r_{i}^2</math>
}}

Le '''moment d'inertie''' est une grandeur [[physique]] qui caractérise la géométrie des masses d'un solide, c'est-à-dire la répartition de la matière en son sein. Il quantifie également la ''résistance'' à une mise en rotation de ce solide (ou plus généralement à une [[accélération angulaire]]), et a pour dimension M·L² (le produit d'une masse et du carré d'une longueur, qui s'exprime en kg·m² dans le [[Système international d'unités|S.I.]]). C'est l'analogue pour un solide de la [[masse|masse inertielle]] qui, elle, mesure la ''résistance'' d'un corps soumis à une [[accélération|accélération linéaire]].

Dans le cas simple de la rotation d'une masse autour d'un axe fixe, le moment d'inertie par rapport à cet axe est une grandeur ''scalaire'' qui apparaît dans les expressions du [[moment cinétique (mécanique classique)|moment cinétique]] et de l'[[énergie cinétique]] de rotation de ce corps. Toutefois dans le cas général d'une rotation autour d'un axe dont la direction varie au cours du temps, il est nécessaire d'introduire un [[tenseur]] symétrique du second ordre, le tenseur d'inertie. Il est toujours possible de choisir un système d'axes, dits axes principaux d'inertie, tels que la matrice représentative de ce tenseur prenne une forme diagonale. Les trois moments correspondants sont ''moments principaux d'inertie''. Dans le cas particulier d'un solide ''homogène'', ils ne dépendent que de la forme géométrique de celui-ci.

En [[Résistance des matériaux|mécanique des matériaux]] l'appellation de « moment d'inertie » est parfois utilisée pour déterminer la contrainte dans une poutre soumise à [[Flexion (matériau)|flexion]]. Il s'agit alors d'une notion physique différente, encore appelée [[moment quadratique]], qui a pour [[grandeur physique]] L<sup>4</sup> (la quatrième puissance d'une longueur, exprimée en m<sup>4</sup> dans le S.I.).

== Approche empirique ==

=== Résistance au mouvement ===
[[Fichier:inertie balai.jpg|vignette|upright=.6|Lequel de ces mouvements est le plus difficile ?]]
{{article détaillé|Analogie entre rotation et translation}}

Le moment d'inertie est au [[mouvement de rotation]] l'analogue de la [[masse (inerte)|masse]] pour le [[mouvement de translation]] : il reflète la « résistance » qu'oppose un corps à sa mise en mouvement.

Cette difficulté est d'autant plus grande, dans le cas de la rotation d'un solide, que les masses en son sein se trouvent loin de l'axe de rotation. Ainsi par exemple dans le cas d'un balai pris en main au milieu du manche ({{cf.}} figure ci-contre), il est plus aisé de le faire tourner autour de l'axe du manche ({{nobr|cas 1}}), qu'autour de l'axe transversal indiqué ({{nobr|cas 2}}). En effet, dans ce dernier cas la brosse, dont la masse relative par rapport au manche est importante, est située plus loin de l'axe de rotation que dans le premier cas (il y a également dissymétrie dans la répartition des masses autour de l'axe de rotation). Comme pour un solide en rotation, la vitesse linéaire d'un point croît en proportion avec cet éloignement, il est nécessaire, à vitesse angulaire égale, de communiquer une plus grande énergie cinétique aux points éloignés. D'où la plus grande ''résistance'' du balai à tourner autour d'un axe transversal qu'autour de l'axe du manche.

=== Énergie nécessaire au mouvement ===

Dans cette analogie, l'énergie nécessaire à la mise en mouvement se transforme (d'une manière ou d'une autre) en [[énergie cinétique]]. Dans le cas d'un [[mouvement de translation]], l'[[énergie cinétique]] d'un point de masse ''m'' est donnée par la formule <math>E_k=\frac{1}{2}mv^2</math>. Dans le cas d'une rotation d'un solide autour d'un axe fixe, il est possible de montrer que l'énergie cinétique totale se met sous la forme <math>E_k=\frac12J_\Delta\,\omega^2</math>, où le terme <math>J_\Delta </math> est précisément le moment d'inertie par rapport à l'axe de rotation, c'est-à-dire une forme analogue à celle de l'énergie cinétique du [[mouvement de translation]]. Le moment d'inertie apparaît ainsi comme l'analogue de la masse (inerte) du solide dans le cas du mouvement de translation, et est donc en relation avec la "résistance" de celui-ci à sa mise "en rotation". En fait l'explication du phénomène empirique de plus grande "résistance à tourner" du balai selon que le choix de l'axe de rotation axial ou transversal est liée au fait que le moment d'inertie par rapport à l'axe dans ce dernier cas est plus grand que dans le premier.

== Mise en évidence et définition du moment d'inertie ==

Soit un [[Modèle du solide (mécanique)|solide]], considéré comme composé de plusieurs points matériels <math>M_i</math> de masse <math>m_i</math>, dont les distances mutuelles sont fixes. Ce système est en mouvement de rotation autour d'un axe <math>\Delta</math>, fixe dans le [[Référentiel (physique)|référentiel]] d'étude, à la [[vitesse angulaire]] <math>\omega</math>, qui est la même (à un instant donné) pour tous les points du système. Le moment d'inertie autour de l'axe <math>\Delta</math> apparaît alors naturellement dans les expressions de l'[[énergie cinétique]] et du [[moment cinétique]] du solide considéré.

=== Énergie cinétique de rotation ===
L'énergie cinétique étant une [[grandeur extensive]], c'est-à-dire que sa valeur sur un système complexe est la somme des valeurs sur les parties élémentaires, l'énergie cinétique totale du solide considéré s'exprime donc sous la forme :
:<math>E_k=\sum_i \tfrac12 m_i v_i^2 = \sum_i \tfrac12 m_i (\omega r_i)^2 = \tfrac12 \omega^2 \sum_i m_i r_i^2\ \overset{\mathrm{def}}{=}\ \tfrac12 J_\Delta.\omega^2</math>,
avec :
* <math>r_i=\mathrm H_i\mathrm M_i</math>, distance du point <math>\mathrm M_i</math> à l'axe de rotation <math>\Delta</math> (<math>\mathrm H_i</math> désignant la projection de <math>\mathrm M_i</math> sur <math>\Delta</math>) ;
* <math>J_\Delta =\sum_i m_i r_i^2</math>.

Cette expression possède une analogie évidente avec celle de l'énergie cinétique pour un [[point matériel]] (ou un solide en translation), où celle-ci s'écrit <math>E_k=\tfrac12 m v^2</math>. Dans le cas de la rotation la [[vitesse angulaire]] ω est l'homologue de la vitesse linéaire ''v'', et le moment d'inertie <math>J_\Delta</math> comme l'homologue de la masse ''m''. Toutefois le moment d'inertie dépend également de la répartition des masses autour de l'axe <math>\Delta</math> et sa valeur dépend donc du choix de celui-ci.

En tant qu'homologue de la masse (inerte) pour la rotation, ce terme reflète la "résistance" du solide à sa mise en rotation, comme il avait été indiqué dans l'approche empirique précédente.

=== Moment cinétique de rotation du solide ===
De la même façon que pour l'énergie cinétique, et du fait du caractère extensif de cette grandeur, le moment cinétique du solide par rapport à un point quelconque <math>\mathrm O</math> de l'axe s'exprime alors sous la forme, en utilisant les mêmes notations que précédemment:
:<math>\vec{L}_\mathrm O=\sum_{i} m_i \overrightarrow{\mathrm{OM}_i}\wedge\vec{v}_i=\sum_{i} m_i(\overrightarrow{\mathrm{OH}_i}+\vec{r}_i)\wedge\vec{v}_i</math>

Comme la vitesse d'un point <math>\mathrm M_i</math> est donnée par <math>\vec{v}_i=\vec{\omega}\wedge\vec{r}_i</math>, la composante du moment cinétique ''colinéaire à l'axe de rotation'' <math>\Delta</math> correspond au second terme de la somme<ref>En effet <math>\overrightarrow{OH_i}\wedge\vec{v}_i</math> est nécessairement perpendiculaire à <math>\overrightarrow{OH_i}</math>, qui lui-même est colinéaire à l'axe <math>\Delta</math>, ''O'' étant situé sur cet axe.</ref>, et se met sous la forme :
:<math>\vec{L}_\Delta=\sum_{i} m_i \vec{r}_i\wedge\vec{v}_i=\sum_{i} m_i\vec{r}_i\wedge\left(\vec{\omega}\wedge\vec{r}_i\right)=\sum_{i} m_i\left(r_i^2\vec{\omega}-(\vec{\omega}\cdot\vec{r}_i)\vec{r}_i\right)=\left(\sum_{i} m_ir_i^2\right)\vec{\omega}=J_\Delta\vec{\omega}</math>, puisque <math>\vec{\omega}\cdot\vec{r}_i = 0</math> par hypothèse.

Dans les deux cas apparaît la grandeur caractéristique, qui ne dépend que de la géométrie des masses du solide, appelé '''moment d'inertie''' <math>J_\Delta</math> par rapport à l'axe <math>\Delta</math> :
:<math>J_\Delta=\sum_i m_i r_i^2 </math>.

'''Remarque:''' il convient de souligner que <math>\vec{L}_\mathrm O</math>, moment cinétique du solide au point <math>\mathrm O</math> de l'axe de rotation n'est pas en général colinéaire à cet axe. Ce n'est que si l'axe de rotation coïncide avec un axe principal d'inertie du solide, ce qui est notamment le cas s'il est un axe de symétrie matérielle du solide, c'est-à-dire à la fois axe de symétrie géométrique et que pour tout couple de points <math>(\mathrm M_i,\mathrm M_j)</math> symétriques l'un par rapport à l'autre on ait <math>m_i=m_j</math>, que <math>\vec{L}_\mathrm O</math> sera colinéaire à l'axe de rotation. En fait on aura alors <math>\vec{L}_\mathrm O = J_\Delta \vec{\omega}</math> par rapport à tout point <math>\mathrm O</math> situé sur l'axe de rotation.

=== Unités du moment d'inertie ===

Du fait de sa définition , le moment d'inertie a les dimensions d'une masse par le carré d'une longueur soit {{dimension|kg=1|m=2}}. Son unité dans le [[système international d'unités]] pourra donc naturellement être exprimée en {{USI|kg=1|m=2}}, unité qui n'a pas de nom propre.

On peut cependant remarquer que dans la relation <math>E=\frac 1 2 J_\Delta.\omega^2</math>, la [[vitesse de rotation]] ω n'est pas exprimée en {{USI|s=-1}}, mais en {{USI|rad=1|s=-1}}. Toutefois, étant défini comme le rapport de deux longueurs, le radian, considéré comme unité dérivée du système international depuis la {{20e|conférence}} générale du BIPM<ref>[http://www.bipm.org/fr/CGPM/db/20/8/ Résolution 8 de la {{20e|CGPM}} (1995)], bipm.org.</ref>, est sans dimension, par suite ceci n'affecte pas l'homogénéité de l'[[équation aux dimensions]] de l'expression de l'énergie cinétique. Il ne serait cependant pas faux que le moment d'inertie soit exprimé en {{USI|kg=1|m=2|rad=-2}}, mais ce choix est rarement retenu en pratique. Son seul intérêt serait de rappeler qu'il s'agit d'une unité spécifiquement rattachée au [[mouvement de rotation]], comme pour toutes les unités où le [[radian]] apparaît.

{{article détaillé|radian}}

=== Généralisation à un solide quelconque ===

Par extension dans un solide considéré comme un ensemble continu de [[point matériel|points matériels]] <math>x</math> affectés d'une masse volumique <math>\rho</math>, le moment d'inertie s'écrit :
:<math>J_\Delta\ \overset{\mathrm{def}}{=}\ \iiint d(x,\Delta)^2\;\mathrm{d}m=\iiint d(x,\Delta)^2\,\rho\;\mathrm dV</math>
où
* <math>d(x,\Delta)</math> est la [[distance (mathématiques)|distance]] entre le point <math>x</math> et l'axe Δ ;
* <math>\mathrm dV</math> est un [[Volume#Volume élémentaire|volume élémentaire]] autour de <math>x</math> ;
* <math>\mathrm dm</math> est la masse de ce volume élémentaire ;
* <math>\rho</math> est la masse volumique autour de <math>x</math>.

Cette définition peut également prendre une forme [[vecteur|vectorielle]] :
:<math>J_\Delta\ \overset{\mathrm{def}}{=}\ \iiint \bigl\|\vec{e}_\Delta\wedge\overrightarrow\mathrm{OM} \bigr\|^2 \mathrm{d}m=\iiint \bigl\|\vec{e}_\Delta\wedge\overrightarrow\mathrm{OM}\bigr\|^2\,\rho\;\mathrm {d}V</math>
où
* <math>\mathrm O</math> est un point sur l'axe <math>\Delta</math> ;
* <math>\mathrm M</math> est un point du solide considéré ;
* <math>\vec{e}_\Delta</math> est un [[vecteur unitaire]] de l'axe <math>\Delta</math> ;
* <math>\wedge</math> désigne le [[produit vectoriel]] et <math>\|\,\|</math> la [[norme (mathématiques)|norme]] euclidienne.

=== Généralisation à un système quelconque ===

En toute rigueur, la notion de moment d'inertie n'est définie que si la quantité <math>\sum_{i} m_ir_i^2</math> peut être isolée des expressions de l'énergie cinétique ou du moment cinétique de rotation, c'est-à-dire que dans la mesure où la vitesse angulaire est la même pour les points du système à un instant donné. Ceci n'est valable strictement que dans le cas du modèle du solide indéformable.

Toutefois, la définition précédente peut s'étendre à un système déformable, dès lors qu'il ne présente pas de [[rotation différentielle]], ou que l'on peut négliger l'effet de celle-ci, de façon qu'il soit possible de considérer que tous les points du système ont à un instant donné la même vitesse angulaire. Par exemple un système articulé, constitué de plusieurs solides reliés entre eux par des liaisons, en rotation autour d'un axe fixe, si les vitesses angulaires de rotation entre les diverses parties sont petites devant la vitesse angulaire de rotation « globale ». Toutefois, pour un système déformable le moment d'inertie n'est plus constant dans le temps.

=== Moment d'inertie et moment cinétique ===

{{Article détaillé|Analogie entre rotation et translation}}
Dans la comparaison entre le [[mouvement de rotation]] et le [[mouvement de translation]], le [[moment cinétique]] est l'homologue de la [[quantité de mouvement]], et pour un système isolé est une grandeur conservative.

Comme indiqué précédemment, il découle de la définition du moment d'inertie que plus les masses constituant un solide sont réparties loin de l'axe de rotation, plus son moment d'inertie par rapport à cet axe est important. Comme la composante axiale du moment cinétique est égale au moment d'inertie multiplié par sa vitesse angulaire de rotation, et du fait de son caractère conservatif, si le moment d'inertie d'un système diminue du fait d'une variation de sa géométrie interne, sa vitesse angulaire de rotation doit augmenter (et inversement).

Ainsi, le patineur sur glace<ref>Il s'agit là d'un système déformable, mais pour lequel on peut considérer que la vitesse angulaire de rotation à un instant donné est la même pour tous les points du système, cf. remarque précédente.</ref> rapproche les bras de son corps lors d'une [[Liste des pirouettes de patinage artistique|pirouette]]. Cela a pour effet de diminuer son moment d'inertie, ce qui, par conservation du moment cinétique<ref>le patineur dépensant autant d'énergie.</ref>, implique une plus grande vitesse de rotation.

De même, les enfants jouant à mettre en rotation un [[tourniquet (jeu)|tourniquet]] en courant à ses côtés atteignent une [[vitesse de rotation]] limitée par leur course. Ils peuvent cependant ensuite sauter sur le tourniquet en mouvement, puis se positionner en son centre, augmentant ainsi significativement la [[vitesse de rotation]] initialement obtenue.

== Cas général : tenseur d'inertie ==

La notion de moment d'inertie a été mise en évidence à partir du mouvement de rotation autour d'un axe fixe d'un solide. Or le mouvement général d'un solide par rapport à un référentiel ''(R)'' quelconque peut se décomposer en celui de son [[centre d'inertie]] ''C'' (affecté de la masse totale du système) et un mouvement de rotation propre autour de ''C'' dans le référentiel lié à ce point, en translation par rapport à ''(R)'', appelé ''référentiel barycentrique'' (noté ''(R<sup>*</sup>)'')<ref>Voir notamment Perez, ''Mécanique'', {{6e|édition}}, Masson, Paris, 2001. Cette décomposition entre mouvement du centre d'inertie et mouvement propre dans le référentiel barycentrique est générale pour tout système de points matériels, comme l'expriment les [[Théorèmes de König (mécanique)|deux théorèmes de Koenig]] pour le moment cinétique et l'énergie cinétique. Ce qui caractérise le mouvement du solide, c'est le fait qu'à un instant donné tous ses points ont même vecteur rotation <math>\vec{\omega}(t)</math>. Ce vecteur rotation instantané à un caractère « absolu » : il peut être interprété comme le vecteur rotation entre le référentiel rigidement lié au solide et le référentiel barycentrique, mais il ne sera pas modifié si l'on considère un autre référentiel non lié au solide : voir sur ce point {{Landau|tome 1}} paragraphe §31.</ref>

Il est alors possible d'exprimer comme précédemment le moment cinétique et l'énergie cinétique propres du système, c'est-à-dire évalué dans ''(R<sup>*</sup>)'', notés respectivement <math>\vec{L}^*</math><ref>Ces deux grandeurs s'écrivent <math>\vec{L}^*=\sum_{i} m_i\vec{r}_i\wedge\vec{v}_i^*</math> et <math>E_c^*=\tfrac{1}{2}\sum_{i} m_iv_i^{*2}</math>, avec <math>\vec{v}_i^*</math> vecteur vitesse du point <math>M_i</math> par rapport au référentiel barycentrique ''(R<sup>*</sup>)''. Il est facile de montrer que le moment cinétique propre ne dépend pas du point choisi pour origine: en effet soit deux points quelconques ''O'' et ''P'', il vient aussitôt <math>\vec{L}_O^*=\sum_{i} m_i\overrightarrow{OM_i}\wedge\vec{v}_i^* = \sum_{i} m_i(\overrightarrow{OP}+\overrightarrow{PM_i})\wedge\vec{v}_i^*=\overrightarrow{OP}\wedge\left(\sum_i m_i\vec{v}_i^*\right) + \vec{L}_P^* = \vec{L}_P^*</math> puisque d'après les propriétés du centre d'inertie <math>\sum_i m_i\vec{v}_i^*=(\sum_i m_i)\vec{v}_c^* = \vec{0}</math>, ''C'' étant immobile dans ''(R<sup>*</sup>)''.</ref> et <math>E_c^*</math>, ce qui permet de mettre également en évidence une grandeur ne dépendant que de la géométrie des masses du solide, et généralisant la notion précédente, qui ne se réduit cependant plus à une grandeur scalaire mais sera représenté par un ''[[tenseur]]'', le '''''tenseur d'inertie''''' (appelé aussi opérateur ou matrice d'inertie).

=== Mise en évidence et définition du tenseur d'inertie ===

Le moment cinétique propre <math>\vec{L}^*</math> d'un solide de vecteur rotation instantané <math>\vec{\omega}(t)</math> s'écrit:
:<math>\vec{L}^*=\sum_{i} m_i\vec{r}_i\wedge\vec{v}_i^*=\sum_{i} m_i\vec{r}_i\wedge\left(\vec{\omega}\wedge\vec{r}_i\right)= \sum_{i} m_i\left(r_i^2\vec{\omega}-\left(\vec{\omega}\cdot\vec{r}_i\right)\vec{r}_i\right)</math>,
Il est possible d'exprimer par exemple la composante suivant ''x'' en coordonnées cartésiennes, ce qui donne :
:<math>L_x^*=\sum_i m_ir_i^2\omega_x-\sum_i m_i\left(x_i\omega_x+y_i\omega_y+z_i\omega_z\right)x_i=\left(\sum_i m_i\left(y_i^2+z_i^2\right)\right)\omega_x - \left(\sum_i m_ix_iy_i\right)\omega_y-\left(\sum_i m_ix_iz_i\right)\omega_z</math>.
Dans cette expression, les facteurs entre parenthèses représentent respectivement le moment d'inertie du solide par rapport à l'axe O''x'', noté <math>I_{\mathrm Ox}</math>, et deux termes homogènes à un moment d'inertie, appelés ''produits d'inertie'', notés <math>I_{xy}</math> et <math>I_{xz}</math>. Il est possible d'écrire <math>L_x</math> sous la forme:
:<math>L_x=\begin{bmatrix}I_{\mathrm Ox} & -I_{xy} & -I_{xz} \end{bmatrix}\vec{\omega}</math>,
et en procédant de même pour les autres composantes il vient finalement l'expression du moment cinétique propre sous la forme : :<math>\vec{L}^*=\bar{\bar{I}}\vec{\omega}</math>,
avec <math>\bar{\bar{I}}</math> [[tenseur]] (ou opérateur) d'inertie, qui est défini par:
:<math>\bar{\bar{I}} = \begin{bmatrix}I_{\mathrm Ox} & -I_{xy} & - I_{xz} \\ -I_{xy} & I_{\mathrm Oy} & -I_{yz}\\ -I_{xz} & -I_{yz} & I_{\mathrm Oz} \end{bmatrix} = \begin{bmatrix}\sum_{i} m_i(y_i^2+z_i^2) & -\sum_{i} m_i x_i y_i & - \sum_{i} m_i x_i z_i \\ -\sum_{i} m_i x_i y_i & \sum_{i} m_i(x_i^2+z_i^2) &-\sum_{i} m_i y_i z_i\\ -\sum_{i} m_i x_i z_i & -\sum_{i} m_i y_i z_i & \sum_{i} m_i(x_i^2+y_i^2) \end{bmatrix}</math>,
expression dans laquelle les éléments diagonaux sont les moments d'inertie du solide par rapport aux divers axes, et les éléments non diagonaux sont les ''produits d'inertie''.
De même, l'énergie cinétique propre s'écrit: <math>E_c^*=\tfrac{1}{2}\vec{\omega}\cdot(\bar{\bar{I}}\vec{\omega})</math>.

Il est clair que <math>\bar{\bar{I}}</math> ne dépend que de la géométrie des masses du solide. Il découle des relations précédentes que dans le cas général le moment cinétique propre du système n'est pas colinéaire à l'axe instantané de rotation, les relations précédentes généralisant celles obtenues dans le cas de la rotation autour d'un axe fixe<ref>Il est facile de vérifier que si <math>\vec{\omega}</math> garde une direction fixe dans l'espace, par exemple si <math>\vec{\omega}=\omega(t)\vec{e}_z</math>, les expressions précédentes se ramènent effectivement à <math>\vec{L}^*=I_{\mathrm Oz}\omega\vec{e}_z=I_{\mathrm Oz}\vec{\omega}</math> et <math>E_c^*=\tfrac{1}{2}I_{\mathrm Oz}\omega^2</math>.</ref>.

Le moment d'inertie par rapport à un axe quelconque, de direction donnée par le vecteur unitaire <math>\vec{n}</math> est alors donné par <math>I=\vec{n}\cdot(\bar{\bar{I}}\vec{n})</math>.

=== Caractère tensoriel de <math>\bar{\bar{I}}</math> - Axes principaux d'inertie ===
==== Expression générale du tenseur <math>\bar{\bar{I}}</math> ====
Il est facile de montrer que <math>\bar{\bar{I}}</math> est effectivement un tenseur. En effet, en adoptant la notation <math>x_{i,1}=x_i,x_{i,2}=y_i,x_{i,3}=z_i</math> il est possible de remarquer que la composante <math>I_{\alpha\beta}</math> de <math>\bar{\bar{I}}</math> se met sous la forme suivante<ref>Voir par exemple {{Landau|tome 1}}, §32 et {{Goldstein}}, chapitre 5.</ref>:
:<math>I_{\alpha\beta} = \left(\sum_{i} m_ir_i^2\right)\delta_{\alpha\beta} - \sum_{i}m_ix_{i,\alpha}x_{i,\beta}</math>.
Le premier terme est le produit d'un scalaire (le moment d'inertie par rapport au point O, <math>\sum_{i} m_ir_i^2</math>) par un tenseur (le [[symbole de Kronecker|tenseur de Kronecker]] <math>\delta_{ij}</math>). Le second terme correspond à une somme dans lequel chaque terme correspond au produit d'un scalaire (la masse ''m<sub>i</sub>'') par <math>T_{i,\alpha\beta}=x_{i,\alpha}x_{i,\beta}</math>. Or il s'agit là des composantes du tenseur résultant du [[produit tensoriel]] du vecteur <math>\vec{r}_i</math> par lui-même, donc celles d'un tenseur. Par suite <math>\bar{\bar{I}}</math> est donc bien un tenseur d'ordre deux<ref>Aucune distinction n'a été faite entre composante covariante ou contravariante du tenseur ici, dans la mesure où l'on opère dans un système de coordonnées orthonormées en général.</ref> : ceci était nécessaire de façon à assurer le caractère invariant par changement du système de coordonnées des expressions précédentes de <math>\vec{L}^*</math> et <math>E_c^*</math>. Ce tenseur est évidemment symétrique.

==== Axes principaux d'inertie et éléments de symétrie matérielle du solide ====
Du fait de son caractère symétrique il est toujours possible de choisir un système d'axe tel que la matrice représentant <math>\bar{\bar{I}}</math> soit diagonale<ref>Il est ici fait une distinction, par souci de rigueur entre le tenseur <math>\bar{\bar{I}}</math>, objet mathématique abstrait, et la matrice 3X3 qui correspond à son écriture dans une base donnée, de la même façon qu'il est nécessaire de distinguer un vecteur de ses composantes dans une base particulière, dont les valeurs dépendent du choix de cette base.</ref>: de tels axes sont dits '''''axes principaux d'inertie'''''. Les moments d'inertie correspondants sont appelés '''''moments principaux d'inertie''''', et sont notés <math>I_1,I_2,I_3</math>. Leurs valeurs dépendent de la forme géométrique du solide et de la distribution de la masse en son sein, donc de l'expression que prend sa masse volumique <math>\rho(\vec{r})</math> en chaque point du solide. Pour un solide ''homogène'' ''ρ'' est constante, et les moments principaux d'inertie ne dépendent alors que de la forme géométrique du solide.

En général un solide quelconque possède trois moments principaux d'inertie différents, il est appelé ''toupie asymétrique''<ref>Voir pour ces appellations, Landau, ''op. cit.'' et Goldstein, ''op. cit.''.</ref>. Si deux moments principaux d'inertie sont égaux, par exemple <math>I_1=I_2\neq I_3</math>, le corps est qualifié de ''toupie symétrique'', et si tous les moments principaux sont égaux, de ''toupie sphérique''. Par exemple un parallélépipède homogène quelconque sera une toupie asymétrique, un cône ou un cylindre homogène une toupie symétrique et une sphère homogène une toupie sphérique. La Terre, du fait de son aplatissement aux pôles, est également en général considérée comme une toupie symétrique.

La présence d'éléments de symétrie matérielle simplifie grandement la recherche des axes principaux d'inertie. En effet en présence de tels éléments certains produits d'inertie, par nature impairs par réflexions, s'annulent, ce qui permet de diagonaliser facilement la matrice représentant <math>\bar{\bar{I}}</math>.

Un élément de symétrie (point, axe, plan) ''matérielle'' est non seulement un élément par rapport auquel le solide est ''géométriquement'' symétrique, mais aussi pour lequel sa masse volumique présente la même symétrie. Ainsi un cylindre homogène comporte-t-il un axe de symétrie matérielle (son axe), par lequel passe une infinité de plans de symétrie matérielle, ainsi qu'un autre plan de symétrie matérielle qui est celui perpendiculaire à son axe passant par le milieu du cylindre. En revanche, si le cylindre est constitué de deux demi-cylindres tous deux homogènes, mais de masses volumiques différentes, accolés dans un plan contenant leurs axes, le cylindre possède toujours le plan de symétrie matérielle précédent, mais son axe n'est plus axe de symétrie matérielle. En revanche le plan de symétrie commun des deux demi-cylindres est toujours plan de symétrie matérielle du système.

Il est possible de montrer compte tenu des expressions précédentes des produits d'inertie les propriétés suivantes<ref>Voir par exemple Perez, ''op. cit.'', chapitre 17.</ref>:
* Tout axe de symétrie matérielle est axe principal d'inertie;
* Tout axe perpendiculaire à un plan de symétrie matérielle est axe principal d'inertie;
Ainsi un cylindre homogène a pour axes principaux d'inertie son axe ainsi que tout axe qui y est perpendiculaire, passant par son centre. Par suite, deux des moments principaux d'inertie sont égaux et le tenseur d'inertie prend dans cette base la forme suivante:
:<math>\bar{\bar{I}}=\begin{bmatrix} I_1 & 0 & 0 \\ 0 & I_1 & 0 \\ 0 & 0 & I_3\end{bmatrix}</math>: il s'agit donc d'une toupie symétrique.

==== Relation avec le moment quadrupolaire d'une distribution de masses ====
Le [[Champ gravitationnel|potentiel de gravitation]] créé par une distribution quelconque de points matériels <math>M_i</math> de masses <math>m_i</math> ne se ramène pas en général à la forme obtenu dans le cas d'une distribution de masse à symétrie sphérique. Toutefois la plupart des corps célestes (étoile, planètes…) possède approximativement cette symétrie et les écarts à la sphéricité demeurent faibles. Ces écarts sont évidemment liés à la répartition de la matière au sein de la distribution de masse, et donc doivent être (au moins pour les premières corrections) en relation avec le tenseur d'inertie de la distribution (assimilée à un solide parfait dans la suite) : de fait il est possible de montrer facilement que la première correction non nulle au potentiel sphérique fait intervenir une grandeur tensorielle, le tenseur de '''''moment quadrupolaire''''' de la distribution de masse, dont les composantes s'expriment de façon simple en fonction de celles du tenseur d'inertie.

De façon générale à grande distance d'une distribution de masse le potentiel créé peut se mettre sous la forme d'un développement [[moment multipolaire|multipolaire]] : chaque point matériel constituant la distribution (de masse totale <math>\sum_i m_i =M</math>), repéré par le vecteur <math>\vec{r}_i=\overrightarrow{OM_i}</math> par rapport à une origine ''O'' génère en <math>\vec{r}=\overrightarrow{OM}</math> le potentiel
:<math>\phi_i(\vec{r})=-\frac{Gm_i}{r}\sum_{k=0}^{\infty} \left(\frac{r_i}{r}\right)^k P_k(\cos\theta_i)</math>,
dans lequel <math>\theta_i</math> est l'angle entre <math>\vec{r}</math> et <math>\vec{r}_i</math> et <math>P_k(z)</math> est le [[polynôme de Legendre]] d'ordre ''k''.

Comme ''r>>r<sub>i</sub>'' il est possible de se limiter aux 3 premier termes, ce qui donne :
:<math>\phi_i(\vec{r})\approx -\frac{Gm_i}{r}\left(1+\frac{r_i\cos\theta_i}{r}+\frac{r_i^2(3\cos^2\theta_i-1)}{2r^2}\right)</math>,
ce qui compte tenu de <math>\cos\theta_i=\frac{\vec{r}_i\cdot\vec{r}}{rr_i}</math> devient :
:<math>\phi_i(\vec{r})\approx -\frac{Gm_i}{r}\left(1+\frac{\vec{r}\cdot\vec{r}_i}{r^2}+\frac{(3(\vec{r}\cdot\vec{r}_i)^2-r^2r_i^2)}{2r^4}\right)</math>.

Le potentiel créé par la distribution en ''M'' est égale à la somme des potentiels <math>\phi_i(\vec{r})</math>, et chacun des trois termes se met alors sous la forme :
* terme d'ordre 0 ou ''polaire'' : <math>\Phi^{(0)}(\vec{r})=-\frac{GM}{r}</math>: c'est le potentiel à symétrie sphérique créé par une masse ponctuelle ''M'' à l'origine ''O'' ;
* terme d'ordre 1 ou ''dipolaire'' : <math>\Phi^{(1)}(\vec{r})=-\frac{G\vec{r}}{r^3}\cdot(\sum_i m_i\vec{r}_i)</math>, or en prenant pour origine le centre de masse du système, <math>\sum_i m_i\vec{r}_i=\vec{0}</math>, et le terme dipolaire est nul<ref>Cette situation est très différente d'une distribution de charges, où du fait des différences de signe les « centres de charge » positif et négatif ne coïncident pas toujours, et donc le terme dipolaire ne peut pas être éliminé par un simple choix d'origine.</ref> ;
* terme d'ordre 2 ou ''quadrupolaire'' : <math>\Phi^{(2)}(\vec{r})=-\frac{G}{2r^5}\sum_{i} m_i\left[3\left(\vec{r}\cdot\vec{r}_i\right)^2-r^2r_i^2\right]</math>.

Ce dernier terme est donc la première correction, ''{{langue|la|a priori}}'' non nulle, traduisant la non-sphéricité à grande distance du potentiel de gravitation créé par une distribution de masse. La somme sur ''i'' qui apparaît dans celui-ci peut être réécrite sous la forme :
:<math>\sum_{i} m_i\left[3\left(\vec{r}\cdot\vec{r}_i\right)^2-r^2r_i^2\right]=\vec{r}\cdot(\bar{\bar{Q}}\vec{r})</math>,

où <math>\bar{\bar{Q}}</math> est le '''''moment quadrupolaire''''' de la distribution de masse:
:<math>\bar{\bar{Q}}=\begin{bmatrix} 3\sum_i m_ix_i^2-\sum_i m_ir_i^2 & 3\sum_i m_ix_iy_i & 3\sum_i m_i x_iz_i \\ 3\sum_i m_i x_iy_i & 3\sum_i m_iy_i^2 - \sum_i m_ir_i^2 & 3\sum_i m_i y_iz_i \\ 3\sum_i m_ix_iz_i & 3\sum_i m_iy_iz_i & 3\sum_i m_i z_i^2-\sum_i m_i r_i^2\end{bmatrix}</math>,
:Chaque composante de ce tenseur se met donc sous la forme : <math>Q_{\alpha\beta}=3\sum_i m_i x_{i,\alpha}x_{i,\beta}-\delta_{\alpha\beta}\sum_i m_i r_i^2</math>, et compte tenu de l'expression générale des composantes du tenseur d'inertie d'un solide <math>I_{\alpha\beta} = \left(\sum_{i} m_ir_i^2\right)\delta_{\alpha\beta} - \sum_{i}m_ix_{i,\alpha}x_{i,\beta}</math> il vient finalement l'expression générale<ref>{{Cf.|maj}} {{Landau|tome 2}}, {{nobr|chapitre 12}}, §99.</ref> : <math>Q_{\alpha\beta}=\mathrm{Tr}(\bar{\bar{I}})\delta_{\alpha\beta}-3I_{\alpha\beta}</math>,
:où <math>\mathrm{Tr}(\bar{\bar{I}})</math> désigne la trace de la matrice représentant le tenseur d'inertie, c'est-à-dire la somme de ses termes diagonaux<ref>Celle-ci peut aussi s'écrire <math>I_{\gamma\gamma}</math> en utilisant la convention de sommation sur les indices répétés d'Einstein, il s'agit de la contraction du tenseur d'inertie, par nature invariante.</ref>.

Les axes principaux d'inertie, pour lesquels la matrice représentant <math>\bar{\bar{I}}</math> est diagonale, constituent également une base dans lequel <math>\bar{\bar{Q}}</math> est également diagonale, il vient pour les composantes de ce dernier l'expression <math>Q_\alpha = (I_1+I_2+I_3)-3I_\alpha</math>.

Dans le cas où la distribution de masse est à symétrie sphérique tous les moments principaux d'inertie sont égaux, et alors <math>\bar{\bar{Q}}=0</math>: ce résultat est physiquement évident, et en fait dans ce cas tous les termes d'ordre supérieur du développement multipolaire précédent sont également nuls.

Une planète comme la Terre se comporte comme une toupie symétrique pour laquelle <math>I_1=I_2 < I_3</math><ref>Il s'agit d'une toupie « aplatie aux pôles », donc la matière est « plus éloigné » de l'axe ''Oz'' que des deux autres axes d'inertie, perpendiculaire à celui-ci contenus dans le plan équatorial, d'où un plus grand moment principal d'inertie selon ''Oz''. La différence n'est cependant de l'ordre que de 0,3 %.</ref>, l'axe principal d'inertie selon ''Oz'' correspondant pratiquement à son axe de rotation. Dans ce cas d'après les formules précédentes le potentiel gravitationnel à grande distance se met sous la forme :
:<math>\Phi(\vec{r}) \approx \frac{-Gm}{r}+\frac{GM_T(I_3-I_1)}{r^3}\left[3\cos^2\theta-1\right]</math>, où <math>\theta</math> est l'angle entre la direction de <math>\vec{r}</math> et celle de l'axe principal d'inertie ''Oz''.

=== Ellipsoïde d'inertie ===
Le moment d'inertie d'un solide quelconque de tenseur d'inertie <math>\bar{\bar{I}}</math> par rapport à un axe quelconque dont la direction est donnée par le vecteur unitaire <math>\vec{n}</math> est donné par :
:<math>I=\vec{n}(\bar{\bar{I}}\vec{n})</math>,
en posant <math>\vec{\rho}=\frac{\vec{n}}{\sqrt{I}}</math> cette relation peut se mettre sous la forme :
:<math>\vec{\rho}(\bar{\bar{I}}\vec{\rho})= 1</math>,
en explicitant avec les composantes <math>(\rho_x,\rho_y,\rho_z)</math> de ce vecteur, il vient l'équation d'un [[ellipsoïde]]:
:<math>I_{\mathrm Ox}\rho_1^2+I_{\mathrm Oy}\rho_2^2+I_{\mathrm Oz}\rho_3^2+2I_{xy}\rho_1 \rho_2 + 2 I_{xz}\rho_1\rho_3+2I_{yz}\rho_2\rho_3 = 1</math>,
laquelle prend dans les axes principaux d'inertie une forme particulièrement simple :
:<math>I_1 \rho_1^2+I_2 \rho_2^2 + I_3\rho_3^2=1</math>.
Cet ellipsoïde est appelé ''ellipsoïde d'inertie''<ref>{{Cf.|maj}} Goldstein, {{op. cit.}}, {{nobr|chapitre 5}}.</ref>. Dans le cas d'une toupie symétrique, il s'agit d'un ellipsoïde de révolution, et dans le cas d'une toupie sphérique, d'une sphère. Cette notion n'a plus en général aujourd'hui qu'un intérêt historique, toutefois il est intéressant de remarquer que les axes principaux d'inertie sont les axes principaux de l'ellipsoïde d'inertie.

== Moments d'inertie particuliers ==
Pour les exemples suivants, nous considérerons des solides homogènes (<math>\rho</math> constant) et de masse <math>M</math>.

=== La boule ===
Pour une [[boule (solide)|boule]] homogène de rayon <math>R</math> et de centre <math>O</math>, les moments d'inertie au centre de la boule par rapport aux trois axes sont égaux. On peut donc écrire :
:<math>J_\Delta=\frac13(J_{\mathrm Ox}+J_{\mathrm Oy}+J_{\mathrm Oz})=\frac13\int_V[(y^2+z^2)+(z^2+x^2)+(x^2+y^2)]\,\mathrm dm=\frac23\int_V (x^2+y^2+z^2)\,\mathrm dm=\frac23\int_V r^2\,\mathrm dm</math>
En désignant par <math>\rho</math> la masse volumique, <math>\mathrm dm=\rho\,4\pi r^2\mathrm dr</math> donc :
:<math>J_\Delta=\frac23\int_0^R r^2(\rho\,4\pi r^2\mathrm dr)=\frac{8}{15}\pi R^5\rho</math>
ou, comme la masse de la boule est <math>M=\frac43\pi R^3\rho</math> :
:<math>J_\Delta=\frac25M\,R^2</math>.

=== La barre ===
Dans le cas d'une barre de section négligeable et de longueur <math>L</math>, le moment d'inertie selon un axe perpendiculaire à la barre est, en son centre :
:<math> J_\Delta = \int_{-L/2}^{+L/2} x^2\rho\,\mathrm dx = \frac{1}{12} \rho L^3 = \frac{1}{12} M L^2 </math> (avec <math>M = \rho L </math>)
Ici, <math>\rho</math> exprime une [[masse linéique]] (masse par unité de longueur).

=== Le carré ===
Dans le cas d'un carré de côté <math>a</math>, le moment d'inertie selon un axe perpendiculaire au plan du carré est, en son centre :
:<math> J_\Delta = \int_{-a/2}^{+a/2}\int_{-a/2}^{+a/2} (x^2 + y^2) \rho\,\mathrm dx \mathrm dy = \frac{\rho}{6} a^4 = \frac{M a^2}{6}</math> (avec <math>M = \rho a^2 </math>)

Ici, <math>\rho</math> exprime une [[masse surfacique]] (masse par unité de surface).

=== Le rectangle ===
Dans le cas d'un rectangle de grand côté <math>b</math> et de petit côté <math>c</math>, le moment d'inertie selon un axe perpendiculaire au plan du rectangle (ici l'axe ''Oz'') est, en son centre :
:<math> J_z = \int_{-b/2}^{+b/2}\int_{-c/2}^{+c/2} (x^2 + y^2) \rho(x,y)\,{\mathrm d}x {\mathrm d}y </math>
:<math> J_z = \frac{\rho}{12} bc^3 + \frac{\rho}{12} cb^3 = \frac{M}{12} (b^2 + c^2 )</math> (avec <math>M = \rho b c </math>)
Ici, <math>\rho</math> exprime une [[masse surfacique]] (masse par unité de surface) pour une surface homogène, elle ne dépend donc pas de ''x'' et ''y''. Remarquons que si ''b=c'', on se ramène au cas du carré.

=== Le cylindre plein ===
On utilisera les coordonnées polaires pour simplifier les calculs.
Dans le cas d'un cylindre de rayon <math>R</math> et de hauteur <math>h</math>, le moment d'inertie selon l'axe ''Oz'' du cylindre est :
:<math>J_z = \int_{0}^{R} r^2 (\rho 2 \pi r h\,\mathrm dr) = \frac{1}{2} \rho \pi R^4 h = \frac{1}{2} M R^2 </math> (avec <math>M = \rho \pi R^2 h </math>)
Ici, <math>\rho</math> exprime une masse volumique (masse par unité de volume).

=== Le cylindre creux ===
Dans le cas d'un cylindre creux de rayons intérieur <math>R_1</math> et extérieur <math>R_2</math>, et de hauteur <math>h</math>, le moment d'inertie selon l'axe du cylindre est :
:<math>J_\Delta = \int_{R_1}^{R_2} r^2 (\rho 2 \pi r h\,\mathrm dr) = 2 \rho \pi h \left[ \frac{r^4}{4}  \right]_{R_1}^{R_2} = \frac{1}{2} \rho \pi h (R_2^4 - R_1^4) = \frac{1}{2} M (R_2^2 + R_1^2) </math> (où la masse du cylindre <math>M = \rho  \pi h (R_2^2 - R_1^2) </math>)
Ici, <math>\rho</math> exprime une masse volumique (masse par unité de volume).

== Théorème de transport (ou théorème de Huygens-Steiner) ==
Soit l'axe <math>\Delta</math> passant par le [[Barycentre (physique)|centre de masse]] de l'objet, et un axe <math>\Delta'</math> parallèle à <math>\Delta</math> et distant de <math>d</math>. En calculant comme précédemment le moment d'inertie, on retrouve la relation établie par [[Christian Huygens]] connue sous le nom de '''théorème de transport'''<ref>Fascicule de L'Université de Liège, Faculté des Sciences Appliquées, Résistance des matériaux et mécanique du solide exercices, 1999, Pro. S. Cescotto (point 3.B.)</ref> ou '''théorème de Huygens''' ou '''théorème de Steiner''' ou '''théorème des axes parallèles''' qui donne le moment d'inertie <math>J_{\Delta '}</math> en fonction de <math>J_\Delta</math> :
:<math>J_{\Delta '}=J_\Delta+M\cdot d^2</math>

À l'énergie cinétique de rotation propre d'un corps, s'ajoute celle de « translation » circulaire du centre de masse auquel on a affecté la masse totale du solide.

Une conséquence immédiate du théorème de Huygens est qu'il est moins coûteux (en énergie) de faire tourner un corps autour d'un axe passant par le centre de masse.

== Notes et références ==
{{Références}}

== Voir aussi ==
=== Bibliographie ===
* Perez, ''Cours de physique : mécanique'' - {{6e|édition}}, Masson, Paris, 2001, {{nobr|chapitre 17}}.
* {{Goldstein}}, {{nobr|chapitre 5}}
* {{Landau|tome 1}}, {{nobr|chapitre 6}}.

=== Articles connexes ===
* [[Moment cinétique]]
* [[Moment d'inertie normalisé]]
* [[Moment quadratique]]

{{Portail|physique}}

[[Catégorie:Mécanique du solide]]